Le processus d’individuation de C.G. Jung

Le processus d’individuation comme voie de réalisation du potentiel humain

Processus d’individuation :

Par des efforts de conscientisation soutenus dans le temps, il s’agit d’unifier l’ensemble de notre psyché et se sortir de l’emprise des algorithmes automatiques inconscients qui sous-tendent nos perceptions à l’état de veille. S’éveiller de l’état de veille semi-consciente vers un état de lucidité.

A l’image de l’allégorie de la caverne de Platon : le processus d’individuation, c’est sortir de la caverne pour retrouver le réel.

L’être humain est un être incomplet dans le mesure où il n’a pas fait l’effort de s’individualiser, c’est-à-dire naître à soi-même une seconde foi au sein même de sa psyché après la mort de ses propres représentations sur lui-même et le monde.

Ce processus est analogue à un processus d’initiation, de mort et de renaissance : c’est la mort des algorithmes automatiques et la renaissance de l’esprit de l’individu libéré de ses représentations intériorisées automatiquement par socialisation.

Inconscients du devoir immanent d’eco-psychologie, l’individu grandit alors avec comme base toute la programmation intérieure automatique qui s’est fait au fur et à mesure de l’inattention sur le filtre entre intériorité et extériorité. Les éléments extérieurs se voient interiorisés automatiquement et pris pour des faits car émanent « d’autorités » (parents, profs, Etat, religion, idéologies, dogmes, médias, culture, « experts », société, croyances).

Ce filtre, cette membrane, constitue notre personnalité, l’idiosyncrasie de notre Ego. L’Egostasie. Il nous incombe d’être les gérants de notre Egostasie, et de contrôler notre conscience, sous peine d’être embourbé dans un ensemble d’algorithmes qui nous font perdre la notion de réel et nous embourber dans une représentation hyper-formatée.

L’immaturité de la conscience peut demeurer du berceau au tombeau.

Ce que nous appelons « nous-même » comprend un ensemble de programmes qui n’ont absolument pas été placé dans notre microcosme intérieur par notre propre volonté, mais par un feedback non-contrôlé entre intérieur et extérieur. Dès lors, il se trouve que nous ne sommes pas « nous-mêmes » dans la mesure où nous n’avons pas pris conscience de tout ce qui compose notre intériorité, et que nous ne contrôlons pas le filtre de feedback d’informations entre intérieur et extérieur qu’est notre « Moi conscient » ou « Egostasie », l’homéostasie et l’idiosyncrasie de l’Ego.

Toutes les formes de socialisation qui ont eu une emprise sur la construction de notre personnalité se voient remises en question à la lumière d’une conscience lucide et unifiée pendant le processus d’individuation. Au final, nous cessons les projections sur autrui et le monde. Ils sont alors enfin accueillis pleinement pour ce(ux) qu’ils sont.

Ce processus s’apparente au phénomène de métanoïa, littéralement : Au-dessus (meta) de la pensée-perception (noïa), une transformation complète de la personne par les forces inconscientes du psyché selon C.G. Jung, à l’image de la chenille qui devient chrysalide puis papillon.

En termes théologique, « Métanoïa signifie au-delà de nous, au-delà de l’intellect, de notre raison rationnelle et se rapporte à un mouvement de conversion ou de retournement par lequel l’homme s’ouvre à plus grand que lui-même en lui-même. »

L’homme est amené à la nature à l’état de « chenille », rampant dans une intelligence froide remplie d’algorithmes. Seul lui-même peut, par ses propres efforts d’individuation, devenir « papillon » et naviguer librement dans les sphères de l’Esprit et des sentiments.

Autrement dit :

« L’objet de perceptions « homme » a la faculté de se métamorphoser, comme la graine de la plante a la faculté de se développer en plante complète.

La plante se développera selon les lois objectives contenues en elle ; l’homme, par contre, demeurera dans son état imparfait s’il ne s’empare pas en lui-même de la matière à transformer, et ne la métamorphose par sa propre force.

La Nature fait seulement de l’homme une créature naturelle ; la société ne fait de lui qu’un exécuteur de ses lois ; lui seul peut se transformer en être libre.

À un certain degré d’évolution, la Nature le laisse échapper de ses chaînes ; la société mène cette évolution plus loin ; l’homme seul peut la parachever. » – Rudolf Steiner

En prenant comme point d’appui pour notre perception consciente un point plus élevé que notre Ego, au delà de nos représentations « rationnelles », duquel nous pouvons regarder en Roi notre microcosme intérieur fragmenté, nous transmuons en effet notre rapport à nous-même totalement vers une intériorité plus profonde que la surface de notre personnalité. Nous avons un être spirituel qui grandit à l’intérieur de nous et qui dépasse toutes nos représentations sur le réel. Il nous incombe de préparer au mieux sa naissance, et de s’efforcer d’être de bons « parents ».. pour enfanter de nous-mêmes.

Diagram 10

D’un point tout d’abord perdu dans ses propres représentations (la trance hypnotique des masses, l’inconscient collectif, le Maya, le Samsara ambiant), nous nous épurons petit à petit en laissant place à une conscience intérieure plus lucide (l’Esprit, l’Âme, la Conscience Primordiale (Atman).

Nous ne naissons pas pleinement humains, nous « devenons » humains en réalité, c’est un processus d’évolution permanente qui dépend entièrement de nous-mêmes, et qui tend vers l’Infini lui-même. Il n’y a pas de limite d’évolution de la conscience.

Ce mouvement volontaire de notre point de conscience du « moi » vers le « Soi » tend à l’harmonisation de toutes les forces de notre psyché vers l’unification de l’être et vers l’éveil de notre conscience. Le point de référence personnel n’est plus l’Ego, mais notre être intérieur profond, la conscience qui nous anime depuis la naissance indépendamment des filtres idéels à chaque période de vie, du développement de notre personnalité. L’Egostasie, « Moi » devient alors un objet de perception tout comme l’est la table ou le ciel. Sauf que c’est notre propre responsabilité de nous occuper de ce jardin-là, et que dépendant de notre maîtrise quant à ses caractéristiques particulières, il nous aidera plus ou moins à véhiculer toute notre Êtreté spirituelle.

Notre personnalité devient fluide pour permettre d’aller rechercher les ressources nécessaires au sain développement de notre être profond. La nourriture que nous allons chercher est spécifique à chaque « UN »(dividu), mais toujours composée de tout ce qui en notre âme nous fait ressentir liberté et amour, en tout choix.

Nous sortons de la trance hypnotique de l’état de veille et nous éveillons à la grandeur de l’expérience terrestre. Nous retrouvons la curiosité et la joie de l’enfance. Evidemment, ce cheminement ne se passe pas sans fracas. Toute la densité, l’épaisseur égotique qui nous anime, est peu à peu transmutée d’ombre à lumière.

Nous empêchons le sain développement de nos êtres profonds, car nous confondons l’outil qu’est l’Egostasie avec notre Êtreté réelle. Il faut donc, en se plaçant du point de l’Êtreté, pénétrer l’Egostasie, notre personnalité, et la reconfigurer pour laisser place à une meilleur croissance de notre intériorité profonde, et vivifier ses forces directement.

S’occuper des complexes inconscients autonomes, les mauvaises herbes du jardin intérieur, cela passe d’abord par macérer dans cette ombre, pour la goûter, la connaître intimement, car elle fait partie de nous-mêmes. C’est d’abord conscientiser tout ce que l’on a rejeté en nous-mêmes, car ce n’était pas acceptable à l’extérieur. Ce faisant, nous retrouvons peu à peu conscience de la plénitude de notre être en dehors du formatage imposé par l’extérieur interiorisé. La liberté intérieure grandit, jusqu’à la libération totale lors de la naissance de sa propre psyché individualisée.

Nous sommes tous en train d’opérer un processus de maïeutique en nous-mêmes.

La société opère un processus inversé et essaye de tuer nos esprits alors même qu’ils sont encore au stade de développement. Beaucoup sont happés par les algorithmes et les injonctions puissantes du monde sociétal et des parents, et se retrouvent emprisonnés dans une toile algorithmique très dense. Cela a pour effet de rendre les gens malades et fous, car ils perdent petit à petit leur âme et leur conscience, elle s’en va petit à petit de leur corps, dont les complexes inconscients autonomes prennent le contrôle.

Et bon nombre d’humains sont littéralement « morts-vivants », dans le sens où leur conscience ne fait plus partie de leur corps, qui est alors composé uniquement d’algorithmes automatiques gérés par l’inconscient collectif. Une machine biologique parfaite qui ressemble en tout point à un humain physiquement mais qui n’a rien à voir avec un être humain possédant un Esprit.

Cette impulsion anti-évolutive (ou involutive) de la société permet paradoxalement de donner l’impulsion de s’échapper aux conditionnements qu’elle impose, en soumettant l’âme à de tels vices qu’elle rendra l’humanité entière dépressive et suicidaire jusqu’à ce qu’on prenne le temps de se tourner vers elle et qu’on accueille sa présence.

Accueillir son âme et la conscientiser, c’est  notre seul travail pour changer son monde et le monde.

C.G. Jung et son oeuvre ont laissé un héritage à l’humanité qui nous permet d’avoir des clés de compréhensions afin de ne pas être perdus dans l’évolution de notre conscience.

Le processus d’individuation est une étape première vers le devenir humain.

Le perfectionnement de nos êtres n’a absolument aucune limite. La maturation psychologique est analogue aux premiers pas de l’enfance pour le corps physique.

L’ignorance, la paresse, l’indolence et l’inflation de l’Ego représentent les obstacles à nous-mêmes, aux autres et à la biosphère, qu’il nous incombe de surmonter pour évoluer réellement.

Alors faisons preuve de courage face à cette bataille de l’Esprit contre la Matière, ou de la Vie contre la Mort. Ces opposés polaires sous tendent la tension primordiale de la Création, et l’Homme a pour destin de reformer en lui-même ce qui a été séparé lors de l’impulsion originelle de séparation duelle. Solve et Coagula, dissoudre et coaguler, différencier et rassembler, après avoir séparé le subtil de l’épais, c’est plonger dans la matière et retrouver la liberté de l’Esprit en elle-même, c’est lui rendre l’Honneur d’être l’expression divine du monde spirituel en s’éveillant en Elle et en vivant dans les deux mondes à la fois en Esprit conscient de son incarnation dans le monde matériel.

Nous avons à nous occuper d’une unité psychobiologique humaine, notre corps et notre personnalité, ainsi que psychospirituelle, notre âme et notre esprit. Cette conscience individuée a pour mission de reconnecter le courant coupé entre le pôle de l’Eternel et le pôle du Mortel. Par nos efforts, nous relions notre Egostasie à la Source, et ce faisant, nous « allumons » l’âme-conscience, le véhicule spirituel, la Merkaba de notre propre individualité. L’humanité est comme un gros projet artistico-poético-scientifico-mystique d’auto-conscientisation de l’Univers fractalisé.

Et la source est très pieuse, dans le sens où elle nous laisse une liberté d’action TOTALE, qui rend le choix de se reconnecter à Elle absolument dépendant de notre propre impulsion individuelle. Bien que les structures mathématiques tendent vers la conscientisation globale, tous les choix menant à cette réalisation finale devront être vécu et choisi malgré tout totalement librement, et cela fait toute la beauté de la création

Nous sommes nous-mêmes dans notre microcosme intérieur un univers entier, co-créateur plénipotentiaire dans le royaume global de créations qui nous anime et qui nous entoure. Nous sommes à la fois le pinceau, l’artiste, la peinture et la toile, et nous apprenons petit à petit à reconnaître toutes ces différentes facettes de nous-mêmes.

 

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